MESSAGE DU BUREAU DU SYNDIC ET DES ENQUÊTES
Il arrive qu’un patient ne soit pas satisfait de ses nouvelles lentilles ophtalmiques ou que le traitement pharmacologique recommandé n’ait pas donné le résultat attendu. Quelles sont les obligations de l’optométriste prescripteur et/ou de l’optométriste qui a vendu les lentilles? À quoi le patient doit-il s’attendre de son optométriste et quels sont ses recours s’il n’obtient pas satisfaction?
Il peut aussi arriver qu’un patient insatisfait des services d’un autre professionnel vous consulte afin de vous demander votre avis. Quelles sont alors vos obligations?
OBLIGATIONS DE L'OPTOMÉTRISTE
Qu’il soit le prescripteur ou celui qui a exécuté l’ordonnance, l’optométriste est tenu à une obligation de moyens et non de résultats. Les gestes professionnels posés doivent respecter les normes cliniques en vigueur. Le choix des tests, les méthodes utilisées, l’analyse des informations obtenues et les recommandations au patient doivent être conformes aux standards reconnus par la profession.
Si l’obligation de moyens est rencontrée, un optométriste pourra difficilement être blâmé pour d’éventuelles difficultés d’adaptation d’un patient à ses lentilles ophtalmiques. Ceci dit, l’optométriste doit se montrer disponible et assurer un suivi lorsqu’un patient lui fait part de problèmes visuels ou d’une insatisfaction avec le traitement qu’il lui a prescrit ou fourni. Il doit essayer de trouver la cause de ses problèmes et recommander une solution quand celle-ci existe. L’optométriste n’a pas l’obligation de faire cette vérification sans frais ni d’assumer le coût de la modification du traitement, à moins que le professionnel n’annonce une politique de service à la clientèle en ce sens auquel cas il devra alors la respecter.
Il est vrai que la plupart des professionnels de l’optique au Québec offrent une garantie d’adaptation à leurs patients et qu’ils changent habituellement les lentilles sans frais quand le patient revient avec une ordonnance modifiée dans les premières semaines suivant la livraison des lunettes. Mais comme cette pratique n’est pas une obligation professionnelle, le prescripteur ne doit pas prendre pour acquis que les nouvelles lentilles seront faites sans coûts additionnels pour le patient. Si l’optométriste a commis une erreur (par exemple en transcrivant l’ordonnance), c’est lui qui devra, s’il y a lieu, en assumer les coûts, que ce soit ceux des nouvelles lentilles, du nouveau médicament ou de l’examen de suivi.
Par la Dre Johanne Perreault, optométriste et syndique
Patient insatisfait d'un traitement prescrit
RECOURS DU PATIENT INSATISFAIT
Comme précisé précédemment, le patient devrait pouvoir rencontrer le professionnel qui lui a fourni les services, et ce, dans un délai raisonnable. S’il contacte le bureau du syndic, nous l’informons qu’il doit s’attendre à des honoraires pour la visite de suivi et que, si l’optométriste a effectivement fait une erreur, nous serions d’avis que les honoraires prévus pour cette visite ne devraient pas lui être chargés.
Un patient pourrait aussi vouloir rencontrer un autre optométriste afin d’obtenir un deuxième avis. Nous lui suggérons plutôt de voir le premier professionnel pour commencer, mais, dans certains cas, le lien de confiance est brisé et il ne veut plus le rencontrer une autre fois.
Le patient pourrait contacter le bureau du syndic afin de nous demander de l’aider dans ses démarches. Cette médiation est souvent le moyen le plus efficace. Le professionnel et sa clinique sont généralement de bonne foi, le problème en est souvent un de communication ou de compréhension mutuelle et, entre professionnels, nous trouvons habituellement ensemble une façon de régler le différend à la satisfaction des deux parties en cause.
Le bureau du syndic pourrait être saisi d’une demande d’enquête quant à la qualité des services professionnels rendus par un optométriste. Ce n’est pas l’idéal pour les différends d’ordre financier puisqu’il y a un délai de plusieurs mois avant que nous puissions rendre notre décision suite à l’enquête et que ce processus n’a pas pour objectif de déterminer s’il y a lieu d’octroyer un dédommagement pour un préjudice subi par un plaignant, mais plutôt de déterminer si la conduite de l’optométriste devrait faire l’objet de mesures disciplinaires ou d’un signalement au Comité d’inspection professionnelle.
Comme la demande principale du patient est souvent le remboursement des honoraires d’examen ou du coût des lunettes, il est fort possible que nous abordions avec lui la possibilité de s’adresser à la Cour des petites créances. Normalement, il devrait auparavant avoir envoyé une mise en demeure à l’optométriste en cause en l’informant de ses difficultés et en lui demandant de régler son problème à l’intérieur d’un délai déterminé, à défaut de quoi il ira voir un autre professionnel, changera ses lunettes au besoin et lui réclamera le remboursement des frais encourus.
ON VOUS DEMANDE UN DEUXIÈME AVIS
Lorsqu’un patient se présente en demandant un deuxième avis, l’optométriste devrait se servir de toutes ses ressources afin d’identifier la cause du problème et, si nécessaire, recommander un changement du traitement. Quoique ce soit une belle occasion de mettre en valeur son expertise, il n’est cependant pas opportun de porter un jugement sur le travail de l’autre professionnel. Facile de faire le gérant d’estrade quand la partie est terminée. Qui dit que ce collègue n’en serait pas venu aux mêmes conclusions s’il avait eu l’occasion de faire le suivi ? Il est possible qu’il y ait eu erreur ou incompétence, mais sans voir le dossier du premier optométriste et sans avoir le portrait complet de la situation, il est préférable de garder ses conclusions pour soi. Si toutefois des doutes sérieux surgissent à propos de la compétence d’un optométriste, il serait important de nous en aviser.
Suite à l’examen, nous recommandons de toujours suggérer au patient de retourner voir l’optométriste prescripteur ou, selon le cas, le professionnel qui a exécuté l’ordonnance en lui remettant les nouveaux résultats et les recommandations quant aux changements à apporter puisque nous savons tous que la plupart des bureaux vont reprendre les verres sans frais si le patient se présente avec une nouvelle ordonnance dans les quelques semaines suivant la livraison des lunettes. De plus, un patient qui achèterait immédiatement des lunettes chez vous sans en avoir précédemment avisé le premier optométriste pourrait avoir plus de difficultés à obtenir un dédommagement à la Cour des petites créances s’il décidait de s’y présenter. Le bureau du syndic pourrait éventuellement blâmer un optométriste pour avoir ainsi vendu des lunettes et avoir omis de prendre les intérêts monétaires du patient en considération. Si le patient insiste malgré tout pour se procurer de nouvelles lentilles chez vous, vous devriez alors annoter son dossier à cet effet.